Pour le respect des droits fondamentaux des personnes trans
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Motion déposée par la commission LGBT au vote du Conseil Fédéral d’Europe-Ecologie-Les Verts des 17 et 18 novembre 2012.

Exposé des motifs :

Le sexe d’une personne est généralement déterminé par les médecins à la naissance, puis il devient un fait juridique et social.

Pour comprendre le concept d’identité de genre, il importe de bien distinguer la notion de sexe de celle de genre. Alors que la notion de « sexe biologique » renvoie essentiellement à la différence entre mâles et femelles, mais aussi aux différentes formes d’intersexuation, celle de genre définit les hommes et les femmes en tant que construction sociale normée.

Le sexe juridique est assigné à un enfant à sa naissance en fonction de la vision extérieure de ses organes génitaux. Dans bien des cas, cela ne correspond pas à son genre réel ressenti et/ou aux formes d’expression de son genre qu’il va cultiver en grandissant, dans sa vie quotidienne. L’identité de genre, c’est l’expérience intime et personnelle profonde qu’a chaque personne de son propre genre, qu’elle corresponde ou non à son sexe de naissance. Les personnes trans construisent ainsi un genre qui ne correspond pas à leur état civil et peuvent désirer que leur état civil soit le reflet de cette identité, mettant ainsi en accord leur statut juridique et leur genre social. C’est non seulement l’intérêt des personnes trans mais celui de la société dans son ensemble que l’on puisse s’entendre collectivement et d’une façon pacifique, ordonnée, sur le genre de chacun et de chacune. Selon les personnes, l’expression de genre passe par les différentes formes de langage (parlé, en particulier via l’accord de genre, visuel à travers les vêtements), le comportement social, le régime hormonal (masculin, féminin) ou la configuration corporelle, dont la modification peut exiger des interventions chirurgicales diverses. Mais il faut garder à l’esprit que ces modifications, dont plusieurs peuvent être vues comme l’adaptation à des normes de genre existantes, ne sauraient constituer un préalable à l’obtention d’un changement d’état civil.

Peuvent être trans des personnes déjà ou pas encore opérées au niveau des organes génitaux, mais aussi des personnes qui choisissent de ne pas subir d’opération ou qui n’ont pas accès à la chirurgie. Il peut s’agir de personnes transgenres femme-vers-homme ou homme-vers-femme, qui ont – ou  non – subi une intervention chirurgicale ou un traitement hormonal, et aussi de travestis et d’autres personnes qui n’entrent pas strictement dans les catégories homme ou femme.

Il est également fondamental de distinguer le genre et l’orientation sexuelle. L’orientation sexuelle doit être entendue comme la capacité de chacun d’éprouver une profonde attirance émotionnelle, affective et sexuelle envers des individus de genre ou de sexe opposé (hétérosexualité), de même genre (homosexualité), ou des deux (bisexualité), et d’entretenir des relations intimes et sexuelles avec ces individus.

La situation des personnes trans en France, du point de vue des droits humains, est méconnue et négligée. Pourtant, ces personnes font face à des problèmes graves, souvent spécifiques. Elles sont exposées à de multiples discriminations, à l’intolérance et même à la violence. Leurs droits fondamentaux sont bafoués, y compris le droit à la vie privée, le droit à l’intégrité physique et à l’accès aux soins.  Dans leur vie quotidienne, comme du point de vue des garanties juridiques, beaucoup de personnes trans ne peuvent manifestement pas exercer leurs droits fondamentaux.

De plus, pour accéder aux traitements et aux chirurgies,  les trans doivent encore se soumettre au diagnostic médical d’un psychiatre définissant la transidentité comme un trouble, une pathologie. Les classifications médicales nationales et internationales prévoient qu’un diagnostic de troubles mentaux devrait être posé dans le cas des personnes transgenres. Or la transidentité n’est pas un trouble. Cela commence à être reconnu et le même mouvement qui a conduit autrefois à la dépsychiatrisation de l’homosexualité est en marche. Dès lors, ces diagnostics sont dénués de fondement scientifique et ne constituent rien d’autre qu’un obstacle à l’exercice des droits fondamentaux des personnes trans, notamment lorsqu’ils servent à limiter leur capacité juridique, à leur imposer ou à leur refuser un traitement médical pris en charge par la sécurité sociale.

Aujourd’hui, l’Argentine est le premier pays au monde à mettre en place une législation conforme au respect des droits humains liés à l’identité de genre, à l’image de ce que préconisait déjà le rapport de l’ancien commissaire européen aux droits de l’homme Thomas Hammarberg en 2009. A ce jour, aucun Etat en Europe n’a encore été capable de le retranscrire dans sa propre législation. Il est grand temps que la France s’empare de cette question en suivant l’exemple argentin.

Motion :

Le Conseil Fédéral d’Europe Ecologie Les Verts revendique l’application intégrale des principes du rapport du Commissaire des droits de l’Homme du Conseil de l’Europe Hammarberg (Droits de l’Homme et identité de genre – Document thématique, octobre 2009) et demande donc :

– De permettre un libre choix de prénom et de sexe sur les extraits d’acte de naissance, cartes d’identité, passeports, diplômes, carte de sécurité sociale et autres documents officiels. Pour ce faire, le changement d’identité devra être instruit en mairie sur déclaration auprès d’un officier d’état civil. Le changement d’état-civil ne peut en effet être subordonné au pouvoir d’un juge qui puisse exiger une obligation de stérilisation, un quelconque traitement médical, une simple expertise. Comme l’orientation sexuelle, non seulement le genre d’une personne ne peut dépendre de l’appréciation d’un juge, mais d’une façon plus générale, il ne peut dépendre d’une quelconque expertise extérieure.

– De rendre les procédures médicales modifiant les caractères sexuels anatomiques, morphologiques, physiologiques (traitement hormonal, chirurgie) et un éventuel soutien psychologique accessibles et remboursés intégralement par la sécurité sociale – sur le modèle d’un suivi de maternité –  pour les personnes transgenres souhaitant y avoir recours. De cesser de subordonner la prise en charge par la sécurité sociale à un suivi par des équipes pluridisciplinaires dont l’exercice doit être dénoncé dès lors qu’il tente d’établir une tutelle sur la transition des personnes trans, au préjudice de ces personnes et au préjudice des dépenses de santé. De développer l’expertise médicale en prenant en compte toutes les dimensions de l’épanouissement personnel y compris la santé sexuelle, celle-ci incluant la notion de plaisir.

– D’élaborer et de mettre en œuvre, à tous les niveaux administratifs (municipal, départemental, régional et national), des politiques de lutte contre les discriminations et l’exclusion auxquelles font face les personnes transgenres sur le marché du travail, dans l’éducation et dans le système de santé. De consulter les personnes transgenres pour la mise en place de ces politiques. De consulter et de soutenir les initiatives des associations trans d’autosupport et de luttes contre les discriminations.

– L’interdiction de toute discrimination fondée sur l’identité de genre, au même niveau et selon les mêmes modalités que les discriminations fondées sur les autres motifs déjà reconnus par la loi.

– L’instauration d’une protection et d’un accueil spécifique des personnes transgenres victimes de violences et de crimes de haine transphobes.

– D’intégrer l’identité de genre dans les activités des organes de promotion de l’égalité, notamment du Défenseur des Droits et des agences régionales contre les discriminations existantes ou en cours de création.

– De soutenir et développer la recherche en sciences sociales pour recueillir et analyser des données sur la situation des personnes transgenres en France et dans le monde au regard des droits humains, y compris sur les problèmes de discrimination et d’intolérance.

– De porter un lobbying diplomatique intense visant à faire sortir la transidentité de la liste des maladies mentales de l’OMS.

– D’assurer une présence des questions de genre et de transidentité dans les programmes scolaires et de former les personnels en contact avec les jeunes à l’accompagnement des adolescents en recherche identitaire.

– De prendre en compte la situation spécifique des trans mineurs dans toutes les dispositions concernant les personnes trans. Cela est absolument indispensable car la transidentité peut se révèler dès l’enfance. Sa prise en charge avant l’adolescence permettrait de rendre beaucoup plus simple la transition des personnes concernées.

Motion votée à l’unanimité moins six voix (deux contre, quatre abstentions).

Premiers signataires :

Commission LGBT d’EELV
Florence Bertocchio, co-responsable de la commission LGBT (Midi-Pyrénées)
Philippe Colomb, co-responsable de la commission LGBT (Ile-de-France)
Enzo Poultreniez, trésorier de la commission LGBT (NPdC)
Grégoire Vialleton, co-secrétaire de la commission LGBT (Ile de France)
Magali Deval, co-secrétaire de la commission LGBT (Bretagne)

Pierre Serne, délégué thématique « Genre, Orientation sexuelle et Société »
Céline Petrovic, déléguée thématique « Genre, Orientation sexuelle et Société »

Conseillers-ères fédéraux-ales titulaires :
Aarsse Rodéric (Ile-de-France)
Azoug Nadia (Ile-de-France)
Baupin Denis (Ile-de-France)
Belliard David (Ile-de-France)
Bezli Fatima (Auvergne)
Bock Michel (part nationale, IdF)
Bonnet Delphine (Pays-de-la-Loire)
Cassez Priscilla (NPdC)
Chalencon Géraldine (Ile-de-France)
Cloarec Dominique (Ile de France)
Cosse Emmanuelle (Ile-de-France)
de Crémiers Christelle (Part nationale, Ile-de-France)
Denes Olwen (Bretagne)
Deval Magali (Part nationale, Bretagne)
Dubarry Véronique (Ile-de-France)
Franjou Patrick (Ile De France)
Le Pabic David (Ile-de-France)
Loiselet Eric (part nationale, Champagne-Ardenne)
Michel Agnès (Ile-de-France)
Supiot Frédéric (Hors de France)
Tery-Verbe Alix (Centre)
Tondelier Marine (part nationale, NPdC)

Conseillers-ères fédéraux-ales suppléant-e-s:
Marie-Elisabeth Allaire (Pays de la Loire)
Cyrielle Chatelain (Franche-Comté)
Pierre Christophe (Lorraine)
Sergio Coronado (Hors de France)
Sylviane Dupont, co-secrétaire régionale EELV NPdC (NPdC)
Corinne Faugeron (Ile de France)
Elisabeth Loichot (Ile de France)
Antoine Maurice (Midi-Pyrénées)
Isabelle Meiffrein (Midi-Pyrénnés)
Maurice Morel (Rhône-Alpes)
Joelle Remoissenet (Pays de la Loire)
François Soulabaille (IdF)
Marie Toussaint (Ile-de-France), membre du COP

Parlementaires :
Karima Delli, députée européenne (Ile-de-France)
Catherine Grèze, députée européenne (Midi-Pyrénées)
Corinne Bouchoux, sénatrice (Pays-de-la-Loire)
Sergio Coronado, député (Hors de France)
Denis Baupin, député (Ile-de-France)

Adhérent-e-s :
Gérard Onesta, adhérent (Midi Pyrénées)
Sarah Trichet-Allaire (Pays de la Loire), responsable de la commission Féminisme
Gaelle Krikorian, co-responsable de la commission Partage 2.0, adhérente Ile-de-France
Jean-Sébastien Herpin (Centre)
Loïc de Fabritus, adhérent Hors de France
Dominique Trichet-Allaire (Pays de la Loire)
Claude Chapron, adhérent Hors de France, membre de la commission LGBT
Pascal Pierson, adhérent Bretagne
Pierre Jestin, adhérent Hors de France
Serge Borvon, adhérent Bretagne
Alain Jean-Joseph (Ile-de-France)
Xavier Rose, adhérent Ile de France, membre de la commission LGBT
Claire Grover (Ile-de-France)
Frederic Brun, adhérent (Ile De France)
Arnaud Dussud, adhérent (Ile De France)
Saadika Harchi (Ile-de-France)
Anthony Poulin (Franche-Comté)
Philippe Stanisière, adhérent Ile De France
Cléo Lallement (IDF)
Sylvain Garel, co-président du groupe EELV Paris
Benoit Delière, adhérent Champagne-Ardennes, membre de la commission LGBT
Florence Pelissier-Combescure (Ile-de-France)
Xavier Knowles (Ile de France)
Philippe Schmitt (Bourgogne)
Elise Lowy, membre du Bureau exécutif (Basse-Normandie)
Jérôme Gleizes, membre du Bureau exécutif (Ile-de-France)

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